Par suite du développement maritime et commercial de Dunkerque, la mairie devenue insuffisante, est démolie en 1896. La construction d'un nouvel Hôtel de ville plus imposant (son édification entraîne la démolition de plusieurs maisons) est confiée à l'architecte lillois Louis Cordonnier, également auteur du Palais de la Bourse d'Amsterdam, des Hôtels de ville de La Madeleine et de Loos, du Palais de la Paix à la Haye. L'hôtel de Ville dont il vient de doter la cité de Dunkerque est peut-être son chef d'oeuvre. Cet élégant monument est conçu dans ce style néo flamand qui sied si bien à nos villes du Nord, avec son heureux mélange de briques et de pierres, son imposant beffroi (dépourvu de carillon). La première pierre est posée solennellement le 30 mai 1897 et l'ensemble est inauguré le 17 septembre 1901, par Émile Loubet, Président de la République, lors de la réception à Dunkerque du Tsar Nicolas Il.
L'hôtel de Ville de Dunkerque a été détruit par faits de guerre, et plus précisément par bombardement le 27 mai 1940, au cours du siège de la ville. L'incendie a détruit tous les aménagements intérieurs et le mobilier. Cependant le gros oeuvre a été moins éprouvé. Dès juillet 1940, dans l'attente de la construction d'un nouveau bâtiment administratif, la mairie est transférée provisoirement au 26, rue de Soubise. Le projet de restauration est confié à l'architecte Louis Cordonnier fils, dont le père était l'auteur de l'édifice originel. Par séance extraordinaire du 1 1 octobre 1947, le Conseil Municipal adopte le cahier des charges et le devis descriptif établis par Louis Cordonnier relatif aux travaux de réparations et transformation de l'hôtel de ville. Les travaux sont confiés, dans le cadre des dommages de guerre, à l'entreprise Lilloise Paul Rouzé. Dans ses grandes lignes, le bâtiment reste identique à ce qu'il était primitivement. La toiture ainsi que la charpente complètement détruites sont à refaire entièrement. La toiture est considérablement simplifiée dans sa décoration, la charpente, en bois à l'origine, est reconstruite en béton. A la demande du Conseil Municipal, les bâtiments en retour des façades latérales partiellement démolis sont abattus, faisant ainsi disparaître les statues qui s'y trouvaient. Les façades sont reconstruites dans un style également très simplifié. L'hôtel de Ville est inauguré le 15 octobre 1955 par le président de la République René Coty. En avril 1955, une fois les services installés, la construction de l'aile Nord est envisagée. Au rez-de-chaussée sont prévus les locaux du Bureau d'Aide Sociale, au premier étage, des bureaux administratifs, au second étage une grande salle de conférences. Par la suite , afin de permettre un fonctionnement satisfaisant des services municipaux, l'hôtel de Ville est complété, en 1974, par l'aile Sud de la rue Faulconnier.
Bâti dans le goût de la renaissance flamande, cet édifice affirme une allure magistrale grâce à son Formidable beffroi, culminant à 75 mètres, marque des libertés et des franchises communales. La façade se développe sur une longueur de 56 mètres avec 19 mètres de hauteur sous corniche et 26 mètres jusqu'au faîtage. Un soubassement de 3 mètres de haut, en pierre blanche et en granit, sert de socle au monument. Son portail, d'une élégante sobriété, est dominé par la majestueuse statue équestre de Louis XIV qui réunit Dunkerque à la France et sous laquelle s'inscrivent en un cartouche les armes de Dunkerque. De chaque côté de cette baie, sont placées les statues des principales célébrités Dunkerquoises , ces dernières ont été réalisées par le sculpteur Augustin Peene , à noter que les ailes latérales de l'édifice en étaient également ornées à l'époque (celle de l'historien Pierre Faulconnier et celle du peintre Jean De Reyn). On remarque ainsi de chaque côté : GUIILLENMOT : 1774-1840, général d'Empire en 1813, Pair de France en 1824, son nom figure sur l'Arc de Triomphe de l'Étoile. Robert de CASSEL : 1299-1331, 23ème Comte de Flandre, fils de Robert de Béthune, créa le Magistrat, la Garde Orpheline et les confréries militaires. EMMERY : 1754 - 1825, négociant, colonel de la Garde Nationale sous la Révolution, maire sous l'Empire, premier maire de France ayant reçu la Légion d'Honneur. VANSTABEL : 1744 -1797, capitaine de navire devenue contre-amiral sous la Révolution. A sauvé la France de la famine en 1794 en amenant à Brest un convoi de blé d'Amérique. BAUDOUIN III : Troisième Comte de Flandre qui donna à la ville ses premières fortifications. Décédé en 964. JACOBSEN : 1563-1637, amiral flamand vainqueur de nombreux combats navals au service des rois d'Espagne.
La disposition de l'édifice est très simple, facile d'accès : tout le rez-de-chaussée est affecté aux bureaux et services divers , ces services occupent également les deux ailes latérales. Lorsque l'on franchit la porte principale, le vestibule d'un grand caractère, conduit à l'escalier d'honneur, qui se développe dans une cage de 15 mètres et mène à l'étage à un vestibule plus riche encore que le premier. Au fond de ce vestibule, un immense vitrail domine l'escalier. Réalisé en 1898 par Félix GAUDIN, auteur également de la grande coupole de la salle de fêtes de l'exposition de 1900, ce vitrail est monté en 1899 à son emplacement actuel. Endommagé au cours de la première guerre mondiale, un peintre décorateur le démonte en 1939 peu après la déclaration de guerre. Ce n'est qu'en 1953 qu'Etienne Delannoy, maître-verrier à Lille entreprend de le remonter après avoir remplacé les pièces brisées au cours des transports successifs. Sa composition symbolique représente l'entrée triomphale de Jean Bart à Dunkerque après sa victoire du Texel (29 juin 1694) qui lui permet de reprendre aux Hollandais, qui s'en étaient emparés, une flottille de vaisseaux chargés de blé acheté par la France. Jean Bart est ici figuré, non pas sous les traits et avec le costume d'un homme de la mer mais en gentilhomme. Derrière lui, des marins maintiennent contre le bord du quai la chaloupe qui vient de l'amener à terre et d'où débarquent ses officiers. Toute la population DUNKERQUOISE, avec à sa tête le clergé et les échevins, a franchi, pour l'accueillir, les remparts de la ville dominés par la tour du Leughenaer et percés par de nombreuses portes dont la Noord Porte ou Porte Jean Bart, reconstruite dans la cour, deux monuments de Dunkerque que l'on reconnaît sur ce vitrail, ornement vivement apprécié de mon Hôtel de Ville. Décoration des salons : La reconstruction de l'hôtel de Ville, incendié en 1,940, étant pratiquement achevée, le maire Paul Asseman décide, en 1955, de mettre en valeur les grands salons pourvus, avant-guerre, de peintures murales rappelant les événements historiques de la ville. En décembre 1955, il charge le sculpteur Robert Coin, premier grand prix de Rome, d'exécuter huit panneaux décoratifs en staff, représentant des motifs allégoriques choisis par l'administration municipale. Les premiers panneaux sont posés, en 1956, dans la " Salle des Mariages ". Ils représentent "la Force dans l'adversité", "la Prospérité dans la paix", "l'Homme dominant la mer", "l'Homme domptant le feu". Les seconds, livrés en 1958, sont placés dans l'ancienne " Salle du Conseil " et représentent "l'industrie", "le Commerce", "I'Agriculture", "la Marine". Puis en mars 1957, le maire ouvre un concours de peintures murales comprenant : Dans la Salle du Conseil (Salle Vauban) : Un grand tableau dont le sujet est imposé par le maire: "Dunkerque porte ouverte sur le monde". Il évoque les transports maritimes vers les colonies et les pays étrangers. Un tableau plus petit, au sujet lui aussi imposé : "Développement de la Ville de Dunkerque qui était à l'origine un petit port de pêcheurs et qui est devenu un grand port commercial". Ces tableaux sont réalisés, en 1958, par l'artiste parisien Robert Chapelet. Dans la Salle de la Rotonde : Un tyrnpan au-dessus de la porte, représentant, sur souhait du maire, les armoiries de Dunkerque entre les anciennes armes de la Province (lion de Flandre) et les armoiries du chevalier Jean Bart. Cette décoration est réalisée, en 1958, par le peintre Lillois Adolphe Costenoble. Dans la salle des mariages : Un grand tableau dont le sujet imposé par la municipalité représente "I'Entrée triomphante de Louis XIV à Dunkerque le 2 décembre 1662. Nous y voyons, le comte d'Estrades, Gouverneur de Dunkerque, recevoir le souverain à la porte de Bergues et lui remettre les clefs de la ville. Le Bailly et le corps échevinal en robe lui font acte de soumission. Un tableau de dimension plus modeste au sujet lui aussi imposé. Il s'agit de "Yolande de Flandre, et son château". Fille de Robert de Cassel, Dame de Dunkerque, héritière de la seigneurie, Yolande a joué un rôle primordial dans l'histoire de Dunkerque. Elle a fait bâtir, à l'entrée du port, un château représenté sur le tableau. Par son mariage en 1340, la Seigneurie de Dunkerque passe de la Maison de Flandre à celle de Bar. Ses armes, aussi représentées, deviendront celles de Dunkerque. Ces deux tableaux, livrés en 1958, sont l'oeuvre de Pierre-Paul Desrumeaux, directeur de l'École Régionale des Beaux-arts de Lille.
Au dessous du vitrail et sur toute la longueur du grand palier, un cartouche surmonté des armes de la ville, encadre une plaque de marbre. Là sont gravés les noms du maire et des adjoints qui ont présidé à l'érection de l'hôtel de Ville ainsi que le nom de l'architecte qui l'a conçu. Au centre des armoiries de la ville se trouve un écusson : - dans sa partie supérieure est représenté un lion symbolisant le Lion des Flandres. - dans sa partie inférieure se trouve un dauphin. L'écusson est surmonté d'une armure. Les armoiries sont entourées de citations décernées à la ville pour son comportement héroïque au cours des différentes guerres : - DUNKERQUE A BIEN MÉRITÉ DE LA PATRIE: décernée en 1793 - VILLE HÉROÏQUE SERT D'EXEMPLE A TOUTE LA NATION : décernée à l'issue de la guerre 1914 - 1918. Les dates 1793, 1917-1940 rappellent les souffrances subies par la ville lors des combats. Sont appendues à la pointe de l'écu, selon l'ordre chronologique de leur attribution, les décorations suivantes : - la croix de la Légion d'honneur, que le Président de la République Raymond Poincaré a remise à la ville, lors de sa visite officielle du 10 août 1919. la croix de guerre 1914-1918, avec palme (citation à l'ordre de l'armée), décernée le 18 octobre 1917, à la demande du maire Henri Terquem, Dunkerque ayant été la première ville à recevoir cette distinction, jusque là réservée aux combattants. - la Distinguished Service Cross, décoration britannique remise au nom du roi Georges V, le 18 mars 1919, en reconnaissance des services rendus aux troupes et à la marine britannique par Dunkerque, seule ville française a avoir été ainsi honorée. - la croix de guerre 1939-1945, avec palme (citation à l'ordre de l'armée), remise par le Président de la République Vincent Auriol, lors de sa visite officielle le 12 juillet 1947.
LA NOORD PORTE
La Noord Poorte ou Porte Jean-Bart était située primitivement sur le quai, place du Minck, à peu près dans le prolongement de la rue des Arbres. Elle s'ouvrait sur le "Wishmarkt", marché aux poissons, non loin du pied du Leughenaer et faisait partie de la longue muraille du port qui partait du Leughenaer à l'extrémité de la rue de Bergues (rue de l'amiral Ronarc'h). Son histoire se confond avec celle de la muraille du quai des Hollandais. En 1406, les remparts bourguignons avaient remplacé les fortifications de Baudouin III comte de Flandre, élevées de 960 à 964. Les nouveaux remparts comprenaient une forte et haute muraille flanquée de 28 tours. Trois portes permettaient de rentrer en ville dont la "Noord-Poorte". En 1591 une nouvelle muraille fut levée entre le marché du poisson et la porte de l'horloge. Rachetant Dunkerque en 1662, Louis XIV la transforme en place stratégique fortifiée et l'embellit considérablement. Il y fit aménager deux places spacieuses, planter des arbres, aligner les rues et ériger de beaux monuments dont la porte de la marine, construite en 1686, et la Noord Poorte monumentale, bâtie en 1690 selon quelques historiens. C'est d'ailleurs près de cette porte que débarqua, en triomphe, Jean Bart accompagné de ses officiers et marins, le 3 juillet 1694, après sa victoire du Texel. (Cette scène triomphale est représentée dans le grand vitrail de l'hôtel de ville placé dans l'escalier d'honneur). Ce souvenir historique valut aussi à cette porte le nom de Porte Jean Bart. La muraille du port fut souvent réparée et en 1758, elle fut entièrement rebâtie depuis le jardin des Récollets jusqu'à l'escalier du Petit Château. En 1839, elle fut entièrement démolie depuis le bourg de guinée (porte du quai) jusqu'à la porte de la poissonnerie, nom aussi donné à la Noord Poorte. Mais la partie comprise entre celle-ci et la Tour du Leughenaer fut conservée à cause de sa solidité ; le service du pilotage s'y était d'ailleurs installé en 1757 et y avait fait aménager un étage. Puis la Noord Poorte fut partiellement bouchée et se transforme en un estaminet (à l'ancienne espérance) où les marins aimaient à s'entasser. Il en fut ainsi jusqu'à la fin du XIX ème siècle. Le vieux Minck étant reconnu insuffisant, exigu et malsain, on résolut de l'agrandir en communication directe avec le quai. La vieille muraille et ses dépendances furent donc abattues dès octobre 1899 et la Noord Poorte démolie. Considérant l'intérêt architectural de son fronton, le maire en fit prendre un moulage en plâtre. Puis le 16 décembre 1905, le conseil municipal décidait de rétablir l'ancienne porte qui fut réédifiée dans la cour de l'hôtel de ville contre le mur de l'Ouest. Les travaux de remontage de ce monument, qui ne s'avère être qu'une copie, furent longs et délicats et ne s'achevèrent que le 8 février 1907. Achevé en 1902, le nouveau Minck fut incendié en 1940 et démoli à son tour en 1953. La Noord Poorte eut plus de chance et ne fut touchée que par un éclat d'obus restauré en 1965, ce souvenir monumental n'est malheureusement pas accessible au public qui méconnaît ainsi un bel élément architectural.
LA PLACE CHARLES VALENTIN
Par délibération du Conseil Municipal, la Place d'Armes est baptisée place Charles Valentin le 6 juillet 1946. Sur la place d'Armes, appelée autrefois " Cruystraete ", on donnait fêtes et réceptions , on y jouait les " mystères ", des drames, des pièces de théâtre... mais on y procédait aussi aux exécutions de la justice criminelle. C'est là qu'étaient exécutés par le feu hérétiques et sorciers. On y montait aussi, en 1 840 encore, le "carcan" où étaient exposés, sous un écriteau indiquant le motif de leur punition, des condamnés pour défit d'adultère, de vol ou de blasphème. De nos jours, il ne subsiste rien de cette ancienne place d'armes, appelée aussi place aux herbes. Le coeur de Dunkerque s'est peu à peu déplacé vers la place Royale, actuelle place Jean-Bart. Charles Valentin : Il est élu maire de Dunkerque de 1925 à 1939, puis député de Dunkerque de 1936 à 1939. Tout au long de son mandat, il porte une attention particulière au développement des uvres sociales. Il ne néglige pas pour autant la vie économique locale et se fait l'ardent défenseur, tant à Dunkerque qu'à l'Assemblée Nationale, des activités portuaires et maritimes. Il existe également une place Charles Valentin à Gravelines, ville où son propre père a eu la charge premier magistrat de 1904 à 1919.
LE DRAPEAU DE DUNKERQUE
Dunkerque possède son drapeau particulier qui peut se décrire ainsi, d'argent (c'est-à-dire blanc) à fasces d'azur. En d'autres termes, sur un fond blanc, sont disposées trois bandes bleues parallèles, donc au total six bandes alternativement blanches et bleues, la bande du haut étant blanche. L'origine de cet emblème reste cependant bien obscure et fait plus référence aux traditions qu'aux documents d'archives. Sous la domination espagnole, Dunkerque possédait son pavillon propre qui, hissé en haut des mâts de ses navires était en fait celui de sa "marine ". En 1662, Dunkerque fut définitivement rachetée et acquise à la France. Pour favoriser la guerre de course, Louis XIV flatta les corsaires DUNKERQUOIS en les autorisant à porter un pavillon particulier. Accordé par ordonnance royale du 23 juin 1684, il était blanc, chargé d'une croix bleue en son milieu. Durant le XVIII ème siècle, les DUNKERQUOIS conservèrent leurs deux pavillons, l'un blanc et bleu, l'autre à croix rouge. Cet usage nous est affirmé par divers tableaux. Jusqu'à la Révolution, les navires DUNKERQUOIS arborèrent leur drapeau qui fut remplacé, par règlement du 3 décembre 1817, par le pavillon de l'arrondissement de Cherbourg qui adoptait les couleurs bleu et blanc de l'emblème DUNKERQUOIS et avec seulement quatre bandes. Ce pavillon qui flotta près du pavillon national sur le grand mât des goélettes islandaises, entraîna cependant de nombreuses confusions. C'est ainsi que sur le vitrail de l'hôtel de Ville de Dunkerque, l'artiste a représenté le drapeau DUNKERQUOIS avec ses bandes inversées qui, sous cette présentation est celui du port de Memel.